Cet article est un extrait de la tribune “Le droit est mort, vive le droit !” par Thomas Saint Aubin et Laurent Vidal.
La technologie permet aujourd’hui à un juriste, sans grandes difficultés,de coder ses contrats en ayant recours à l’algorithmie, c’est-à-dire à une suite d’instructions qui, correctement exécutées, conduisent à un résultat recherché.
Nous pensons que l’algorithmie juridique doit désormais prendre toute sa place dans les programmes de formation initiale et continue des juristes car, ainsi que nous avons tenté de le montrer, c’est en intégrant une démarche heuristique que les juristes de tradition romano-civiliste pourront se prémunir des écueils de l’IA et du deep learning, qui ont massivement recours aux méthodes de programmation classiques qui demeurent déterministes.
Selon J.R. Wisdom , l’heuristique est « une méthode informelle sans garantie de succès (par opposition à une méthode déterministe). Une démarche heuristique consiste, face à un problème, à essayer un chemin en gardant la possibilité d’en essayer d’autres si celui qui paraissait prometteur n’a pas conduit rapidement à une solution » .
À l’issue de cette démarche heuristique pré-programmée en amont par le juriste, il sera alors possible de consacrer en aval un « principe de garantie humaine de l’IA ».
La dernière loi bioéthique , sur proposition de David Gruson, a intégré cette démarche pour l’eSanté, qui permet l’établissement d’un certain degré de supervision humaine des algorithmes utilisés en médecine.Conformément au principe du procès équitable, il nous semble utile et possible de la consacrer également sous certaines conditions pour les procédures contentieuses, qu’il s’agisse des juridictions étatiques ou d’arbitrage, en particulier lorsque sont utilisées les Online Dispute Resolution.
En substance, et c’est là en réalité un constat d’évidence : qu’ils le veuillent ou non, qu’ils les considèrent comme souhaitables ou non, les juristes doivent tenir compte des différentes ruptures introduites par les nouvelles technologies et le cortège de dangers qui les accompagnent. Mais ils doivent également en identifier les potentialités.Réinventer le droit n’est pas un choix. C’est à la fois une nécessité et une opportunité unique. Et puisqu’il faut le faire avec les outils à notre disposition, il est impératif de ne point les subjectiver : ni enfer de la technologie, ni pierre philosophale ou veau d’or.
N’ayons pas peur des mots : il s’agit bien d’une « rénovation civilisatrice » qui nous attend.
Thomas Saint Aubin, Laurent Vidal.
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